Cocorico... Notre fier symbole

Le coq est un symbole qui fait l'orgueil des français. Il semble que ce soit le seul oiseau capable de chanter avec les pieds dans le guano. (1)

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Le coq n'a jamais été l'emblème de "nos ancêtres les gaulois" mais simplement l'objet d'un jeu de mots des romains qui se moquaient de leurs voisins. En latin le même mot gallus désigne à la foi le coq et le gaulois. A partir du IXème siècle cet emblême ridicule, que personne ne nous envie, est propulsé au sommet des clochers. On trouve des références au coq dans des courriers diplomatiques en date de 1496. C'est ainsi que nous lisons sous la plume de Pierre-Jean Rémy, dans Trésors et secrets du Quai d'Orsay, (Editions JC Lattès, 2001)...

Harangue des envoyés de Charles VIII, roi de France,
au pape Alexandre VI, le 12 Juillet 1496.

[...] Ne croyez pas que cette nation (la France) qui souvent mis en danger et sans dessus dessous ces romains déjà parvenus à un haut point de gloire, qui renversa leur ville, qui mit en déroute l'armée, jusqu'alors invincible, de ces maîtres du monde, qui vainquit Lucius Papirius, Torquatus, les illustres Fabius et tant d'autres généraux ; ne croyez pas dis-je que cette nation puisse jamais redouter de lâches prêtres qui, nourris dans la molesse et la débauche, redoutent et ont horreur de la guerre. Pouvez-vous espérer, vous et vos complices effeminés, que vous pourrez seulement regarder en face nos troupes sous les armes rangées en battaille, dont l'approche, le choc ou l'attaque eût rempli d'effroi Camille, Marcellus, Scipion l'Africain lui-même ? [...]

Réponse du pape Alexandre VI Borgia.

[...] Oui, tout le monde l'avouera, vos ancêtres furent de vaillants coqs et leurs neveux de misérables poules. [...] Vous qui mettez votre gloire à vivre au milieu de la plus sale crapule, de l'impudicié et du libertinage, voilà les arts où vous excellez. Ces vérités sont connues de tout le monde. Séditieux en paix, mous et efféminés dans la guerre, pompeux et vains en superbes paroles avant l'action, poltrons et sans courage sur le champ de bataille. [...] un seul jour vous suffit pour parcourir, en fuyant, le chemin que vous avez fait en quatre jours en venant. [...]

Note : On remarquera peut-être, dans les courriers ci-dessus, qu'à cette époque le langage diplomatique était peut-être moins nuancé que de nos jours.

La fierté du coq !
Tout le monde connait l'expression fier comme un pou. Si étrange que cela paraisse, le pou en question n'est pas celui auquel on pense mais bien le coq. En effet, dans cette locution, le mot pou est une forme dialectale de l'ancien français pouil, " coq ou poulet". Or, il est notoire que le coq règne fièrement sur la basse-cour... du haut de son tas de guano.

Le coq dans la littérature
Nous lisons sous la plume de Frédéric Dard, alias San-Antonio

[...] J'aime pas les emblèmes. Les francisques, les croix gammées ou de Lorraine, les coqs dits gaulois. Les hommes sont des gosses. Un coq ! Je te vous demande un pneu (2) à quoi ça ressemble[...] Cet animal ridicule qui baise comme tu poinçonnes ton ticket de la Metro Goldwyn Mayer (3), gratte le fumier, chante hors de propos, fiente toutes les vingt secondes et se prend pour le soleil levant. Je te jure qu'ils sont cons d'arborer leurs insignes insignifiants. [...]

Jean Cocteau écrivait :

«Qu'est-ce que la France, je vous le demande ?
Un coq sur un fumier. Otez le fumier, le coq meurt.»

Le coq image de marque

Vers 1898, Charles Pathé commercialisait en France les gramophones ou graphophones fabriqués aus USA par Columbia. Il les proposait sous sa propre marque ainsi que des copies réalisées dans ses propres ateliers. Il décida de nommer son appareil Le Gaulois et choisit comme logo le coq "gaulois", sans doute pour se distinguer du produit original Columbia qui s'appelait Eagle. A chacun son volatile !


Le coq... nous voilà !
Le coq est toujours bien vivant dans le discours politique. Ainsi, Monsieur Jean-Pierre Raffarin, premier ministre, au cours d'une allocution prononcée à Aix-les-Bains :

«[...] Nous ne pouvons pas rester isolés comme les gaulois assis sur leur tas de fumier, juste bons à annoncer le jour qui se lève [...]».
(Le Dauphiné Libéré, 16 Avr. 2005)

L'annonce du lever du jour est évidemment l'affaire du coq. Par ailleurs M. Raffarin ne déroge pas à la confusion que faisaient les romains en plaçant les gaulois plutôt que le coq sur le tas de fumier (le guano ci-dessus). Toujours ce dualisme janussien du mot gallus. Quant à la position assise des gaulois, serait-ce une allusion à l'affaissement de son gouvernement ?


Illustration à base de coq
Voici notre fier symbole en train de pérorer devant ses confrères des autres nations. Ceux-ci restent sans voix devant son impertinance.

-- rleb, 2004

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Le coq au XXIème siècle
De nos jours la propulsion de coqs en haut des clochers se fait rare, par contre on peut en voir enchaînés au bord des routes, comme ici près de La Buisse (Isère).

-- rleb, 2004


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Vade retro gallus
Le coq a inspiré l'artiste allemande Katharina Fritsch, laquelle a pondu, non pas un oeuf, mais ce coq bleu haut de 4,70 mètres. Cette oeuvre est appelée à trôner pour une durée de dix-huit mois sur le quatrième piédestal de Trafalgar Square. Certains londoniens ressentent comme une agression la présence de ce symbole de l'ennemi héréditaire.

-- rleb, 2013


(1) guano [gwano] n.m.(du quechua). Accumulation d'excréments d'oiseaux. Utilisé ici afin d'éviter l'emploi du mot qui permit au général Cambronne de passer à la postérité.
-- rleb, 2006


(2) (3) Ces jeux de mots sont une spécialité san-antoniaise

    

File: cocorico.html, 2002-xx-xx - Robert L.E. Billon - Last update: 2013-07-29